Nicole Bousquet qui a réalisé l’affiche de la Feria de Nîmes 2023 est une artiste particulière et attachante.
Arrivée à Nîmes il y a 37 ans, après avoir vécu sur des terres non taurines, Nicole est un jour allée seule aux arènes, voir une corrida. Sa première impression fut mitigée puisqu’elle ne comprenait pas ce qui se passait mais ressentait des choses très fortes. Elle parle du sentiment aigu de la beauté du spectacle, de la chorégraphie dessinée par le torero avec le toro, mais aussi de la métaphore de la vie et de la mort qui se joue en un quart d’heure, avec également la question de la spiritualité, de la recherche du torero sur la destinée, de la transcendance aussi.
La dimension artistique de la corrida lui parait essentielle. Elle a dans les yeux certaines trincheras de Joselito. Elle se rend aux arènes dans l’espoir de vivre le duende, ce moment de grâce qui suspend le temps. Elle parle avec émotion de la qualité artistique du toréo de Julio Aparicio fils et pense que sans l’art la corrida serait difficilement défendable.
Nicole Bousquet c’est une vie totalement imprégnée par l’art. Sa première expérience de peinture se situe entre onze et dix-sept ans. A cette époque elle s’évade par la peinture et produit des paysages. Elle va s’éloigner temporairement de la peinture qu’elle retrouvera il y a une vingtaine d’année, suite à un épisode de vie qui la conduisit à se recentrer sur ce qui est finalement l’essentiel pour elle.
Elle pratique par ailleurs d’autre formes d’expression artistique, comme la sculpture ou le dessin. Alliant son expérience de la comédie et son goût de la littérature elle a fait la tournée de lectures-concert « au Plaisir » avec son mari Andrès Roé, elle lit régulièrement des textes, notamment avec les avocats du Diable pour lesquels elle a lu à l’occasion d’expositions de peinture, mais aussi des nouvelles érotiques ou des textes d’auteurs classiques.
Elle a posé pour des peintres, dont Michel Gilles et des photographes, dont son mari qui a récemment ajouté la photo à sa large palette d’expression artistique.
Militante, pendant quelques années dans une association contre les violences faites aux femmes, son féminisme n’est pas pour autant de type agressif. Plutôt que de s’élever contre les hommes elle préfère mettre en valeur des femmes remarquables. Des femmes fortes qui s’imposent.
Ses sujets ne sont d’ailleurs pas exclusivement féminins. Son exposition à l’atelier, pendant la Féria a permis de voir des sujets animaliers ou des portraits d’hommes comme Morante de la Puebla. Torero artiste s’il en fut, capable lui aussi de déboucher le flacon.
Peindre un portrait ou un visage inventé, c’est avant tout, pour Nicole, peindre un regard. Il s’agit pour elle de raconter des vies par le visage et le regard, abordé comme une fenêtre sur l’histoire du sujet.
En dehors de Conchita Cintron, traitée en peinture mais également en sculpture, les portraits qu’elle cite spontanément sont édifiants quant au type de femmes qu’elle met en avant.
On va de Camille Claudel, qui s’est fait un prénom à côté de son frère et s’est rendue indispensable à Rodin à Rita Hayworth à qui rien ne fut donné ni épargné et qui gagna sa place au firmament par la force de son travail.
On trouve également dans cette galerie Marie-Antoinette, Nicole n’étant pas de ceux qui entendent refaire l’histoire, elle pense qu’il est préférable de savoir d’où l’on vient pour savoir où on va.
Mais aussi Simone Veil, icône de la lutte contre les discriminations faites aux femmes en France ou Suzanne Valadon, mère d’Utrillo mais surtout artiste peintre reconnue dont les toiles sont aujourd’hui exposées dans les plus importants musées. Il y a également Lee Miller, compagne et assistante de Man Ray, puis correspondante de guerre et égérie du surréalisme dont Nicole retient qu’elle est le premier reporter à entrer à Buchenwald et Dachau dont elle ramènera des clichés saisissants sur l’horreur de l’holocauste. L’humour d’un cliché célèbre pris par David Scherman sur lequel Lee Miller pose nue dans la baignoire d’Hitler, un portrait de ce dernier à ses côtés, ne la laissant par ailleurs pas indifférente.
Nicole Bousquet peint à l’huile mais également au Brou de noix et peinture. L’une de ses techniques à particulièrement retenu notre attention. Elle a coutume, en règle générale sur de grands formats, de présenter ce qui peut s’apparenter au premier regard à un aplat monochrome.
En réalité il s’agit de plusieurs couches posées sur un portrait ou un personnage initialement peint. Il faut s’arrêter et fixer la toile, en sorte que le dessin d’origine apparaisse. Plus vous restez longtemps face à la toile, plus le dessin apparait clairement.
Cette technique est une invitation à la patience pour celui qui contemple l’œuvre. C’est aussi la promesse d’un plaisir chaque fois différent car en fonction de l’angle et de la partie de l’œuvre que vous fixez les détails qui se révèleront à vous pourront être différents.
Raison de plus pour ne pas hésiter à aller voir et revoir ses expositions.
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